Des consultations (j'invite ceux qui travaillent à l’hôpital a nous rejoindre et aux malades)

Après une nuit courte et agitée, je m'étais levée pour aller travailler. Mon premier jour dans mon nouvel établissement de travail était également le tout premier de la nouvelle année. Eh oui, les gens n'attendaient pas que les fêtes soient terminées pour tomber malade.
Après avoir nourri mes furets, fait ma toilette et m'être habillée d'une tenue stricte mais légère, je m'étais mise en route.
Dans l'hôpital de cette petite ville, la hiérarchie ne m'avait pas été clairement définie. J'ignorais si j'avais un supérieur officiel autre que l’État, l'établissement étant public. Il serait de toutes façons bien assez tôt de m'inquiéter pour cela en arrivant.
Une fois dans le bâtiment, on me conduit dans un bureau de médecin où j'installai mes affaires. Je n'avais pas l'air d'être la première arrivée, aussi décidai-je de jeter un oeil dans les bureaux d'à côté, mais sans aller plus loin. Inutile de m'encombrer de connaissances superficielles.
Alors que je regardais par la vitre du bureau au bout du couloir, histoire de connaître la tête de mes nouveaux collègues, j'eus la surprise de découvrir un visage familier.
Jack... Johnattan, à en voir la plaque cuivrée qui reposait sur son bureau. Devant la porte, installés sur les sièges, quelques personnes me regardaient avec curiosité. Tristesse, solitude, auto-apitoiement... Ainsi donc, celui que j'avais rencontré hier au bal recevait ces âmes en peine.

- Suivant !

Un jeune homme se levait, mais je le pris de vitesse et entrai dans le bureau. Au moins pour saluer la seule personne qui m'était familière... Encore que ce mot fut un peu fort.
Je lui adressai un regard neutre - n'oublions pas que Wendy avait mis le grappin dessus. Inutile de m'engager dans une guerre contre elle simplement pour cet homme que je connaissais à peine.

- Salut. Je viens d'arriver, je passe te dire bonjour avant de commencer à consulter.

J'étais vêtue de la blouse des médecins, un petit badge "Docteur Pomfresh" accroché au revers du vêtement. Je me souvenais, la veille, lui avoir dit que j'étais infirmière. Eh oui, en fait, j'étais un médecin diplômé et tout le touin-touin. Simplement, le mot "infirmière" sonnait mieux à mes oreilles. Surprise !

- Gwen ! Comment allez-vous ? La reprise n'a pas été trop dure ? Vous êtes partie plus tôt que moi il me semble. La soirée était bien quand même.

à vrai dire, j'ignorais totalement quelle était l'heure à laquelle il était parti de la soirée car, dès que j'avais mis les pieds dans la voiture du maire, j'avais dû lutter pour ne pas sombrer dans le sommeil. Néanmoins, même si le réveil avait été difficile, j'avais les idées claires une fois bien éveillée.

- J'arrive à gérer le manque de sommeil, merci. Peut-être pas aussi bien que vous tout de même.

En effet, le visage lisse de Jack ne laissait présumer aucune fatigue ou lassitude. Pas de cernes ni de poches sous les yeux, il avait l'air d'avoir dormi les sept heures pleines règlementaires, même si je savais que ce n'était pas le cas. Sale veinard. Pour ma part, je m'estimais comme toujours très heureuse que Dieu ait inventé l'anti-cernes.
Il reprit la parole.

- Vous êtes dans la partie "médecin généraliste" vous aussi ? Le docteur précédent m'a laissé un tas de patients mécontent. Ce qui me donne pas mal de travail à vrai dire. Mais ils sont tous plus ou moins sympathiques, donc ça peut passer. Comprenez, je n'ai pas l'habitude. La médecine militaire est bien différente de la médecine hospitalière. Et vous, vôtre nouveau poste vous plaît ?

S'il me plaisait ? J'ignorais comment j'occuperais mes journées sans ce poste ! Et le soulagement qu'éprouvaient les patients, mêlé à ma satisfaction d'avoir mené une opération à bien, constituait ma récompense quotidienne. Ces sentiments m'étaient bénéfiques et reposants à côté des émotions négatives qui affluaient dans ma tête au point que je m'en nourrissais comme de mon pain quotidien.

- à vrai dire, je suis spécialisée dans les opérations en bloc stérilisé. C'est fatiguant, mais j'aime bien mon job. Mais j'imagine que de vôtre côté, en tant que médecin militaire, vous avez dû voir les pires plaies possibles. Une expérience particulière, non ?

Mon collègue se redressa soudain et déclara avant de sortir de la pièce:

- Je reviens.

Un peu surprise par cette sortie inattendue, je restai un instant là, les bras ballants, avant de jeter un coup d’œil au dossier ouvert qui gisait sur le bureau. Rien d'intéressant. Ce cher Jack devait s'ennuyer comme un rat mort avec des patients de ce type... à moins que ce ne soit ce qui l'intéresse.
Mais alors que je m'approchais de la fenêtre pour regarder la vue, des pas dans le couloir m'engagèrent à me retourner et...
Je sursautai. Il venait de se prendre dans la figure le haut de la porte. Immédiatement, je portai ma main à mon front, ayant mal pour lui... Au sens littéral du terme. De la surprise m'envahit également; il ne s'attendait manifestement pas à être mis KO par une porte. Pas très adroit, ça.
J'enlevai ma main de ma tête et respirai profondément afin de faire passer la douleur, tout en esquissant vers lui un geste de sollicitude.

- Euh, pas de problèmes ? Qu'est-ce qu'il vous est arrivé ?

M'intégrer. J'étais parvenu à faire ami-ami avec certains citadins mais ce n'était pas suffisant. Je devais me créer une réputation dans cette ville, laisser mon nom quelque part. Je devais tout simplement m'intégrer dans cette foule, me fondre dans la masse. Bon nombre de mes collègues étaient partis consulter un psychologues ou psychiatre, j'imagine qu'il fallait que je suive leur exemple. Je n'ai rien à voir avec ces paysans, ces faux-riches, ces pauvres ignorants qui ne savent même pas prononcer "Mesrine" correctement ou qui ignorent que le premier chien de Ted Bundy, un colley, se nommait Lassie. C'est abjecte. Mon aversion pour la race humaine va finir par atteindre son paroxysme. J'espère qu'elle ne me trahira pas. Je n'ai pas vraiment à m'inquiéter, je trouve toujours une solution et je n'oublie absolument pas que je suis le meilleur. Je suis un génie et personne ne dira le contraire. Les dindons autour de moi me prennent pour un homme respectable, un véritable gentleman. Quel bande d'arriérés ! Le jour où je trouverai quelqu'un qui mérite mon amour est loin d'être venu ! Avec mes clés de maison en poche, j'étais monté à bord de ma superbe Maserati noire vernie avec jantes chromées et sièges 100% cuirs. J'avais vite fait de me diriger vers l'hôpital. La nuit avait été de courte durée mais je ne semblais pas plus fatigué que ça. J'étais resté éveillé toute la nuit, incapable de fermer l'oeil. Je m'étais pourtant régalé avec le repas d'hier soir. La viande n'avait pas été avarié, surprenant - soit dit en passant - de ces deux guenons de la soirée. J'avais l'air de me porter comme un charme et pourtant à l'intérieur, je frémissais. J'avais garé ma voiture sur le parking devant le bâtiment puis promptement, j'avais gravi les marches me menant vers ce fameux psychiatre. Les dames à l'accueil avaient été très aimables avec moi et je voyais qu'elles n'étaient pas indifférentes à mon sourire ravageur. En m'engouffrant dans le couloir, je croisai des malades que je saluai poliment d'un hochement de tête compréhensif. Lorsque je fus devant le cabinet, je n'hésitai pas à toquer avant de me faufiler à l'intérieur. En l'absence de surprise, j'y découvris Jack Johnattan à qui j'offris un sublime sourire amical.

- Ha ! Je savais bien que c'était vous, monsieur Johnattan. Comme quoi, mon instinct ne s'est pas trompé. Je sais que nous avons commencé sur de mauvaises bases tous les deux. Je vous prie d'excuser mon comportement puéril d'hier soir.

Mon regard se posa ensuite sur Gwen dont les formes ne me laissaient pas de marbre et attisaient mes pulsions meurtrières.

- C'est surtout à vous que je dois des excuses, mademoiselle. Je comprends qu'avec l'attitude déplacé que j'ai adopté hier, vous ne vouliez plus rien affaire avec moi.

Je ravalai ma salive, détournant mon regard de la métisse. Après un temps, mon air grave s'effaça et je frappai dans mes mains une fois en m'exclamant.

- Bien ! Si je me suis déplacé jusqu'ici, ce n'est pas pour vous voir spécialement. Pas que je ne vous aime pas, loin de là ! Seulement, c'est une raison particulière. Nous devrions discuter, monsieur Johnattan, vous ne croyez pas ?

Le sourire narquois dessiné sur mon visage pourrait bien déranger le blond mais je m'en fichais pas mal. C'était son métier. Il pouvait bien m'examiner. Il ne dénichera rien d'intéressant. Il ne fera que tourner en rond. J'arriverai sans doute à le mener en bateau. Du moins, pour l'instant...

[ Ouiiin il a mangé "ces deux guenons de la soirée"... Yeeerk ç.ç Je parie qu'il était tout nu dans les escaliers avec une tronçonneuse dans la main ? ]

- Vous travaillez essentiellement en bloc ? Waou ! Quel courage, moi je ne pourrais pas. Mais, j'y pense, vous ne devez pas être loin pour m'avoir rendue visite ?

  Ah, ça, c'était la question qui tuait. Y avait-il un sous-entendu ? "Combien de mètres êtes-vous prête à parcourir pour le plaisir de voir mes beaux yeux ?" Hum, non. Peut-être était-ce une innocente question et que je m'imaginais du cynisme partout.

- Mon bureau est juste au bout du couloir, au tournant qui mène aux blocs opératoires, justement. Nous sommes presque voisins de table. *sourit*

  Mais alors que je m'apprêtais à sortir de la pièce - mon emploi du temps du jour avait probablement été déposé sur mon bureau, bien que, travaillant au bloc, les urgences ne s'annonçaient qu'au dernier moment - des pas dans le couloir me prévinrent de l'arrivée de quelqu'un. On toqua à la porte. Et avant même de l'avoir vu, je sus.
  Il était ici.
  Dans MON lieu de travail.
  La porte ne s'était même pas ouverte que je reculais déjà, jetant un regard horrifié vers la porte. Il avait une signature sentimentale effroyable: de la rancune, de la frustration. Ces deux émotions toujours en fond de ce qu'il ressentait.

- Ha ! Je savais bien que c'était vous, monsieur Johnattan. Comme quoi, mon instinct ne s'est pas trompé. Je sais que nous avons commencé sur de mauvaises bases tous les deux. Je vous prie d'excuser mon comportement puéril d'hier soir.

  L'homme se tourna vers moi, me regarda d'une façon discrète mais obscène et je sentis ses désirs malsains s'affoler. Je les ressentais avec une telle puissance, avec une essence véritable qui ne manqueraient pas de me faire perdre la tête si je restais là. Je ne voulais pas devenir comme lui.

- C'est surtout à vous que je dois des excuses, mademoiselle. Je comprends qu'avec l'attitude déplacé que j'ai adopté hier, vous ne vouliez plus rien affaire avec moi.

  ça, c'était le moins que l'on puisse dire ! C'était affreux. Il avait l'air tellement normal, tellement agréable à vivre et avenant, et disposait d'un charme si puissant que chacun devait vouloir en faire son meilleur ami. Mais je ne pouvais pas voir la fragile couche extérieur de cette chose. Pas moi. Seulement, à qui faire part de mes angoisses ? Comment pourrait-on soupçonner un homme tellement parfait d'apparence ?
  Extrêmement mal à l'aise, je ne répondis rien, ne fit même pas mine d'accepter ses excuses sous-entendues. J'étais tendue comme un [ string ! ] ressort.

- Bien ! Si je me suis déplacé jusqu'ici, ce n'est pas pour vous voir spécialement. Pas que je ne vous aime pas, loin de là ! Seulement, c'est une raison particulière. Nous devrions discuter, monsieur Johnattan, vous ne croyez pas ?

  "Pas que je ne vous aime pas, loin de là" ? Un peu déboussolée par cette formule maladroite, je le regardai avec incompréhension. Qu'est-ce qu'il avait derrière la tête ? QUe voulait-il au juste de cette pauvre ville ? Mais je me ressaisis. Il avait ouvert dans la conversation une brèche, une porte de sortie. à moi de saisir cette chance.

- Eh bien, je vois que vous avez à faire. Je ne vais pas vous déranger plus longtemps, à vrai dire, le secret professionnel m'en empêche. Alors bonne consultation, messieurs.

  Je les saluai d'un signe de tête poli avant de me diriger avec empressement de la porte. M'éloigner, vite ! Avant de commettre un meurtre... au sens littéral du terme.

Avec affolement, la belle infirmière avait quitté la pièce faisant tout pour me fuir du regard. Je devais l'intimider ou lui faire perdre la tête. Rares sont celles qui résistent à mon charme ! Enfin, il était normal qu'elle nous laisse nous entretenir en tête à tête. Nous avons une relation basée sur la confiance mutuelle à construire Jack et moi. Il était donc libre. Je m'étais assis comme il me l'avait si gentiment proposé et l'avait remercié pour son hospitalité. Cette Charlotte n'avait pas été assez futée pour m'empêcher de pénétrer dans le bureau. Son cerveau devait être réparti dans les deux gonflables qui lui servaient de poitrine ! Bon, elle a fait médecine pour en arriver jusqu'ici alors elle doit avoir un minimum d'intelligence. C'est consternant. Moi qui n'ai pas pu faire un Bac S parce que j'étais et je reste un raté en mathématiques. Je n'ai pas intégrer l'élite et eux, ces nuisibles, ces rebuts de la société y sont parvenus ?! J'ai fais un Bac L, ce que je considère comme une bonne chose. J'ai pu faire des études en droits, ce qui m'a énormément apporté. Mais il est répandu que le scientifique ouvre plus de portes et est plus prestigieux si vous voyez ce que je veux dire. En résumé, je suis plus faibles qu'eux, plus vulnérables, plus illettré... Ils sont meilleurs que moi. C'est inadmissible... Impardonnable...

- Mon prénom ? Excusez-moi, j'étais perdu dans mes pensées.

J'avais été tiré de ma rêverie par mon interlocuteur. Je semblais un peu désorienté mais je repris vite mon aise légendaire. Leçon numéro 1 : Ne jamais perdre la face. Et malgré que je me trouvais en territoire hostile, je savais ne pas me laisser déstabiliser. Avec un sourire joueur, j'ajoutai.

- C'est une pauvre thérapie que vous utilisez là, monsieur Johnattan ! Peu d'originalité. Je suis certain que vous pouvez faire mieux que ça ! Je me nomme Larry Mantis. J'ai vingt-huit ans. Si je suis venu, c'est parce que j'en ai besoin. La majorité de mon entourage m'ont conseillé de consulter. Je n'ai pourtant pas de problèmes particuliers. J'ai toujours refusé mais vous m'avez l'air d'être un homme plein de bonne volonté, je ne suis donc en aucun cas en mauvaise compagnie avec vous.

Je conservais mon sourire. Je ne laissais rien me trahir, rien transparaître. J'étais parfaitement stoïque. Je le fixais attentivement, sans méchanceté dans le regard, guettant sa réaction pour pouvoir l'analyser. Je me doutais des questions qu'il allait poser. Certainement les grands classiques...

L'entrevue s'avérait être musclée. Mais la vérité était telle que je ne me sentais pas particulièrement angoissé à l'idée de me savoir sur le terrain de mon interlocuteur. Je n'avais aucune palpitations, rien de semblable à du stress ou à aucune autre émotion. Je semblais presque insensible. Je ne fus en l'occurrence pas surpris de ces quelques compliments que me glissais le blond. En gagnant ma confiance, il pensait lire en moi comme dans un livre ouvert. J'avais eu affaire à suffisamment de psychiatres pour connaitre leur manière de fonctionner. Je ne me sentais absolument pas en danger. Cette entretien était plutôt un amusement qu'autre chose. Je jouais avec Jack comme le ferait un enfant avec un train électrique. Qui de nous deux sera le plus malin ? D'un ton neutre, je lui répondis en m'enfonçant dans mon siège.

- Paradoxale, n'est-elle pas ? Il faut que vous sachiez une chose sur moi, monsieur Johnattan. Je suis quelqu'un de très complexe, vous l'avez sans doute déjà constaté avec vos compétences.

Le bras de fer entre lui et moi se faisait de plus en plus tendu. Je ne craignais pas de m'ouvrir à lui mais il y avait des éléments que je devais modifier dans mon histoire, c'était certain. Un mensonge par ci, un mensonge par là. Je ne le sous-estimais pas. Je savais qu'il se méfiait de moi et de mes belles paroles. Seulement, j'allais créer une énigme. Je suis parfait à ce jeu.

- Si vous insistez ! Je peux vous faire part de mon enfance. Elle ne fut pas facile. Je n'ai pas eu les meilleurs parents qui soient. Ils ne m'appréciaient pas vraiment. Ma mère, elle, elle était dépressive et buvait beaucoup. Quant à mon père, il était indifférent face à tous les mauvais traitements qu'elle me faisait subir. Parfois, je pouvais même discerner un sourire sur ses lèvres alors qu'il la regardait s'acharner sur moi. Je ne peux pas les blâmer pour cela. Seul Dieu peut les juger ! D'un côté, je ne peux qu'approuver aux rapproches qu'ils me faisaient. Je n'étais pas le meilleur en sports, je n'avais pas les meilleurs résultats, je n'étais pas le fils le plus aimant du monde. Sa santé mentale se dégradait de jour en jour. Elle a finit par se tuer et il en fait de même. Il ne pouvait pas se résoudre... à la perdre pour toujours. C'est difficile de vivre avec cette image dans la tête... Leur deux corps côté à côte, unis dans la mort. Depuis, j'ai fais mon deuil mais cette événement tragique me marquera à jamais... Pardonnez-moi. Je deviens émotif maintenant !

Je poussai un soupir. J'étais mal à l'aise et touché par ma propre histoire. Oui, j'avais l'air triste. Je suis un parfait comédien, il n'y aucun doute là-dessus ! Simplement, j'ignorais moi-même si je simulais ou si j'était réellement sincère. Paradoxe.

Ouh quelle enfance difficile !
Une étude psychologique, avait récemment prouvé que les psychopathes naissent principalement d'un traumatisme qui a eu lieu durant leur enfance. Logique, étant donné qu'entre 0 et 16 ans se construisent les bases du mode de pensée de chaque individu...
Mais était-ce le cas de Larry ? Peut-être que oui après tout. Ne montrant que son sourire charmeur à la face du monde, il était possible que sa tête d'intello renferme autre chose.
Mais pas de conclusions trop hâtives ! Ce récit avait l'air de l'avoir touché. Cependant étais-ce son vrai visage ou simplement un masque pré-fabriqué de tristesse qu'il venait de revêtir ?
Mon véritable problème avec Larry, était que je n'arrivais toujours pas à discerner le vrai du faux chez lui. Son histoire, ses émotions … etc Mais qu'est-ce qui était réel ou inventé ? Je ne pouvais pas le savoir, je n'étais ni télépathe, ni empathe !
A ma grande surprise, cette façade (ou pas) de tristesse resta un peu plus longtemps que je ne l'aurais cru.

- Vous parlez de traumatisme, preuve que cela vous a affecté, mais malgré le « deuil » que vous dites avoir fait, est-ce que ces événements affecte votre façon de vivre.

OK, peut-être pas très réconciliant. Mais bon...

- Je parle mentalement et dans vos actes.

Bon, s'il continuait de tirer un peu la tronche après avoir répondu à la question de ce qui semblait être pour lui un événements très marquant de sa vie, je changerais de sujet. Mais je lui avais laissé la possibilité de parler de n'importe quoi. Et c'est une épreuve aussi dure qu'il m'a sortit. Alors qu'il ne vienne pas se plaindre (et j'étais persuadé que ça n'arriverais jamais).
Son mode de pensé m'intriguait. Normalement, les gens commencent par parler de leur situation actuelle, au lieu de débuter par un sujet qui fâche.... Preuve que Larry était un type peu ordinaire. Mais ce surplus de confiance si soudain me rendait perplexe.
Les rares personnes qui s'abandonnent directement à leur psychiatre sans savoir si il est digne de confiance, sont généralement ceux qui ont un grave problème...

Ma façon de vivre ? Ainsi, il désirait savoir si je cachais des choses. C'était un procédé d'une subtilité indéniable pour dénicher mes moindres secrets, je l'avoue. Mais je n'allais pas me laisser piéger. Cet entretien se devait d'être le plus amusant possible ! J'avais encore des éléments à révéler en stock. Je pouvais donc m'en sortir en dirigeant la conversation sur ce que j'avais de positif car j'ai également eu des bons moments dans ma vie. Il furent certes courts mais ma foi, je les ai dégusté lentement et j'ai essayé d'en profiter largement. Je me demandais s'il se doutait que j'étais instable psychologiquement. Bien sûr, il avait l'instinct de tout psychiatre qui se respecte cependant était-il aussi crédule que ceux à qui j'avais eu affaire jusqu'à présent ? Je gardai ma mine triste et mon air anéanti pour lui répondre. A vrai dire, je n'avais pas vraiment prêté attention à mes émotions.

- Cette mésaventure n'a pas empiéter sur ma santé mentale. Je veux dire, si je vous en parle, c'est que cela a été l'épisode le plus long et le plus difficile de ma vie. Mais, j'ai aussi eu des moments de pur bonheur. A l'école, je n'avais pas de soucis. La seule amie que j'avais était particulière. Elle me comprenait et ensemble, nous avons de superbes souvenirs. Malheureusement, nous avons finis par nous perdre de vu en partie parce qu'elle a déménagé. Je pense avoir trouvé du réconfort en elle...

Je ravalai ma salive. Je m'étais justifié auprès de lui de mon choix. Il fallait que je commence par le début de mon histoire pour aller dans la logique des choses. J'étais sincère. Cette fille que je connaissais, j'avais presque oublié son visage. Son nom m'était également flou. J'avais brûlé mes photos de classe alors pour la retrouver, c'était peine perdu. Surtout que depuis le temps, elle ne devait plus être la même qu'auparavant. Elle devait être aussi fade et insipide que ces adolescentes qu'il m'arrive de croiser dans la rue. Elle me connaissais sous mon meilleur jour mais elle ignorait tout de la bête qui sommeille en moi. C'est mieux ainsi... Tout en parcourant des yeux le lieu dans lequel je me trouvais, je me levai sagement et commençai à faire le tour de celui-ci.

- Après la mort de mes parents, j'ai été placé dans un orphelinat. Le traitement là-bas était médiocre. Ce fut un soulagement lorsque j'ai intégré ma nouvelle famille...

Je cessai mon inspection. J'avais fais le tour. Je faisais dos à mon interlocuteur. Mon visage s'illumina à nouveau et je tournai la tête en lui lançant.

- C'est un très joli cabinet que vous avez là, docteur ! Pas un grain de poussière, nickel ! Bureau en chêne fin. Sièges en cuir. Et cette délicate odeur... Ça sent le neuf. Tout ce matériel coûte une petite fortune, n'ai-je pas raison ?

Je caressai le bureau comme pour appuyer mes propos. J'ai le sens de l'observation et de la répartie. Je ne me cache pas d'être perspicace et encore moins d'être intéressé par la décoration et l'art.

- Sûrement. A vrai dire je n'en ai pas la moindre idée. Ce cabinet est à moi depuis ce matin. J'en déduis donc que son ex-propriétaire en prenait grand soin.

Charlotte rentra dans le bureau. Avec ses grands yeux couverts de maquillage, elle me regarda, regardaLarry, et se retourna de nouveau vers moi.

- C'est l'heure de la pause pour nous. On vous laisse. Et si jamais vous voulez vous joindre à nous, il n'y a pas de problème, on sera au réfectoire.

Puis elle s'en alla, me laissant avec mon patient féru de décoration intérieure. Cette infirmière était vraiment très sexy...jupe très courte, pas un gramme de cellulite sur les jambes... Sui sait, j'irais peut-être les rejoindre tout à l'heure...
Je revins à ce que m'avait raconté Larry. Ses courts moment de bonheur m'avaient parut si peu important que s'en était à croire si ça avait été vraiment agréable pour lui.

- Une nouvelle famille ? Demandais-je, cherchant à en savoir plus.

Je semblais surpris. L'ancien propriétaire des lieux devait être sacrement à l'aise financièrement pour avoir un tel intérieur ! Ou alors les meubles étaient fournis par l'hôpital mais cela semblait peu plausible ! Disons que ce bureau dégageait une atmosphère très atypique. Il avait dû être personnalisé par l'ex-docteur. Mon regard se tourna sur l'infirmière lorsqu'elle fit son entrée. Il n'était pas agressif. Dans ma tête, je l'avais déjà tué trois fois mais à l'extérieur, j'étais tranquille et je lui fis même un sourire chaleureux.  

- Oui une nouvelle famille française. Mes parents adoptifs étaient des gens adorables, toujours ouverts ! Mon frère adoptif l'était un peu moins mais il était en pleine crise d'adolescence ! Je ne prêtais pas attention aux regards noirs qu'il pouvait me lancer ! Pour la première fois de ma vie, je paraissait vraiment heureux. Ces gens m'ont apporté le bonheur que je n'avais jamais eu. C'est ma vrai famille. Je les aime et je veux de tout mon coeur les protéger. Vous trouvez cela stupide ? Je ne suis qu'un homme. Je ne pense pas posséder la force nécessaire pour les sauver d'une mort certaine et pourtant, je continu à m'accrocher. Nous autres, êtres humains, avons le don d'être déterminés et inconscients !

Sans la permission, je pris un bibelot sans grande valeur sur le bureau et instinctivement, je me mis à jouer avec alors que je reprenais ma marche et fixait l'extérieur par la fenêtre.

- Le monde est mal fait. Il y a trop de gens qui souffrent, trop de pauvreté. Les politiques n'ont pas d'honneur. Ils ne se soucient que de leur bien-être. Vous n'êtes pas de mon avis, docteur ?

Toujours debout, je ne le quittais désormais plus des yeux et poursuivais d'agiter l'objet entre mes mains.

Oui en effet ce n'était pas judicieux. Je ne pouvais juste pas m'en empêcher ! J'avais cette sale manie qui me collait à la peau et qui refaisait surface ! Je suis quelqu'un de très tactile, j'ai donc besoin d'avoir du contact avec quelque chose, n'importe quoi ! Et il fallait bien que je me divertisse !

- Vous avez peur que je le laisse s'échapper ? lui répliquai-je, en levant un sourcil. Je ne parle pas que de moi et de mon propre bonheur, docteur. Je ne suis pas égoïste. Les Hommes s'entredévorent pour un morceau de pain. Sur d'autres continents, il y a des millions de personnes, des millions d'enfant qui crèvent de faim. Et d'autres se prélassent confortablement sur leurs sièges, à fumer un cigare et à déguster du "homard grillé" ! Pff, cela ne vous révolte-t-il pas ?

Je finis par poser le bibelot à sa place sur le bureau. Je ne désirais pas engendrer le moindre dégât.
Si j'avais posé cette question c'était par ce qu'elle me chagrinait réellement. Je ne suis certes pas le mieux placer pour donner des leçons, moi qui méprise mon petit monde ! Mais, je trouve ce genre de comportement tout bonnement repoussant !

- Les personnes que je connais, aussi respectables soient-elles, sont des pourris gâtés qui se fichent totalement de ma vision du monde et qui en rient même ! Je pense que vous êtes différent. C'est pour cette raison que je voudrai connaitre votre avis sur la question. Après, nous aurons fini cette entretient, j'imagine !

Et un sourire colgate max white pour accompagner mes paroles !

- Permettez-moi d'en douter, docteur ! lui répondis-je avec un air narquois. Vous avez amplement raison mais n'est-il pas temps d'arrêter ? Comme dit le dicton, mieux vaut tard que jamais ! Les gens peuvent encore se comporter de façon civilisé et aider leurs prochains. Si seulement nous pouvions tous être sur un pied d'égalité. L'équilibre du monde se porterait mieux. Pas de guerres, pas de discriminations, pas de famines. Peut être qu'un jour ce rêve deviendra une réalité.

Il allait vraiment me mettre à la porte ? Nous avions papoter pendant plusieurs minutes, c'est un fait et l'heure du déjeuner s'écoulait, c'en est un autre mais j'espérais tout de même continuer cette conversation que je trouvais intéressante et qui m'était favorable. Je ne suis pas fou ! Par stratégie, je cherchais à me faire bien voir des autres et cela avait l'air de porter ses fruits ! Pourquoi pas faire ami-ami avec Jack. J'en suis parfaitement conscient, nous devons garder nos distances et rester très professionnels mais peut être qu'en arrivant à sympathiser avec lui, je pourrai le duper avec plus de facilité. Je le suivis en comprenant que je devais m'entretenir avec la secrétaire. Lorsque nous arrivâmes au bureau de cette jeune femme, je pris soin de la dévorer du regard.

- Au plaisir de vous revoir ! lui glissais-je tout en lui serrant la main qu'il me tendait.

Jack me laissa et mes négociations avec le jeune femme pouvaient commencer. Elle ne durèrent pas longtemps, je voyais bien que je lui avais tapé dans l'oeil ! Après qu'elle est finit de noter, je la remercia et la quitta, son numéro de téléphone qu'elle m'avait donné en poche...